Les intrapreneurs

Avoir un impact positif sur sa carrière, sur son entreprise & sur le monde.

Pour celles et ceux qui – comme moi – suivent cette émission, la nouvelle saison de « Qui veut être mon associé ? » a commencé, l’occasion de suivre de nombreux projets entrepreneuriaux passionnants, plus ou moins avancés, plus ou moins structurés. Bien sûr, nous pourrions discuter ici des travers de ce type de formats télévisuels, parfois trop théâtraux, parfois trop caricaturaux, parfois trop scénarisés autour de l’émotion, et pour cette émission en particulier trop pushy sur la « méritocratie » comme une valeur moderne et inclusive, ce qui bien évidemment est un non-sens sociétal et un raccourci trop facile de parcours entrepreneuriaux plus complexes et plus passionnants que cela.

Toutefois, cette émission permet de découvrir des projets innovants, des entrepreneurs passionnés – et bien sûr bravo à toutes et tous -, et de démocratiser auprès du grand public les mécaniques d’investissements et de financements du monde économique dans lequel nous vivons. C’est une émission pertinente et divertissante nous offrant une lecture du monde entrepreneurial, et merci à M6 pour cela. Mais …

Mais on oublie encore une fois les salariés.es.

A chaque nouveau passage d’un.e entrepreneur.e, l’émission de parle quasiment jamais des équipes travaillant au sein de chaque projet. Les 4 ou 5 associés présents ne questionnent pas les entrepreneurs (ou très peu) sur leurs équipes, sur leur capacité à s’entourer et à développer le portefeuille de compétences de leurs entreprises, sur leur organisation interne, sur les étapes de structuration, sur leur modèle de coopération, … . Au mieux, l’entrepreneur remercie de lui-même et au passage son équipe, mais peu de place est accordée à une réalité essentielle : sans une équipe équilibrée, complémentaire et impliquée, l’idée la plus belle du monde ne restera qu’une idée, ou au mieux un business bancal et peu développé.

Pourtant, lorsque l’émission s’arrête sur les raisons d’une levée de fond et sur l’utilisation du capital dans le développement de l’entreprise, cela pourrait être l’occasion d’aborder cet enjeu essentiel. Quels investissements seront faits en matière de compétences ? Quels choix de recrutement sont aujourd’hui un enjeu dans la stratégie de l’entreprise ? Quelle organisation humaine est envisagée par l’entrepreneur à la cible de son business model ? Et surtout pour quelles raisons un.e salarié.e viendrait travailler pour ce projet ?

Et si on changeait un peu le concept de l’émission ?

En regardant l’émission, je me suis fait cette remarque : et si on changeait le concept de l’émission en « Qui veut être mon salarié ? ». Dans le contexte actuel où il est parfois difficile de recruter, d’attirer les candidats et de les retenir, où la notion de « marque employeur » est au cœur de beaucoup de stratégies RH, je serais en effet curieux – et avec beaucoup de bienveillance – de voir ce genre de concept naître : convaincre un.e salarié.e de rejoindre son entreprise en axant non pas sur les négociations salariales (plus liées à l’exercice de l’entretien de recrutement) mais sur les valeurs portées par l’entrepreneur, sur les besoins de matière de compétences et d’expertises, sur le modèle managérial de l’entreprise, sur la place faite à l’intraprenariat, aux partages d’idées, et à l’innovation collective au sein de projets entrepreneuriaux parfois trop centrés sur le rôle sacré du fondateur ou de la fondatrice.

 

Certes, sans l’audace de ce dernier, sans sa prise de risque et sans sa capacité à leader une idée, il n’y aurait évidemment pas d’entreprises et pas d’innovation dans un monde économique qui doit aujourd’hui relever les enjeux de demain. Toutefois, c’est une erreur de penser qu’une entreprise doit rester centrée sur le fondateur. La réussite du développement d’une entreprise doit se faire autour du projet, des produits et des services qu’elle propose, et pour cela elle doit faire la place nécessaire à l’équipe qu’elle a recruté ou va recruter, elle doit avoir une stratégie managériale et organisationnelle répondant à ses enjeux et ses ambitions, et surtout elle doit créer les conditions nécessaires à l’intraprenariat, à l’innovation interne, et à la créativité de ses équipes, et ainsi au travers d’une équipe équilibrée et complémentaire assurer la réussite durable du projet.